Des chercheurs chinois inventent le « film acoustique » !
Une fois n’est pas coutume, ce qui pourrait bien être une véritable révolution dans les technologies de reproduction sonore nous vient cette fois de Chine, et il faut reconnaître que la découverte de cette équipe de chercheurs de l’Université Tsinghua (Pékin) est sensationnelle.
Cette découverte se base sur une nouvelle application des nanotubes de carbone (photo ci-dessous (c) Wikipédia), structures physiques déjà abondamment étudiées par les chercheurs du monde entier depuis les années 1990. Ces minuscules agencements sont en effet déjà largement pressentis comme moyen potentiel d’administrer des médicaments aux malades et pourraient également être dotés d’usages plus « exotiques », comme la réalisation artificielle de la photosynthèse, ou encore des ascenseurs spatiaux, si, si !
Cependant, personne jusqu’à présent n’avait songé à tester leurs propriétés acoustiques, voilà donc qui est fait, et apparemment nous ne sommes pas au bout de nos surprises…
Le Professeur Shoushan Fan et son équipe de chercheurs de l’UniversitéTsinghua de Pékin, en collaboration avec des confrères de la Normal University (de Pékin également), ont créé un mince film en alignant un grand nombre de nanotubes de carbone d’une épaisseur de 10 nanomètres. Quand les scientifiques ont envoyé un courant électrique audiofréquence au travers du film ainsi constitué, ils se sont rendu compte à leur grande surprise que celui-ci réagissait comme un haut-parleur :
« Nous avons découvert que des films très fins constitués de nanotubes de carbone, une fois alimentés par un courant électrique audiofréquence, pouvaient émettre des sons audibles. L’origine de ce phénomène a pu être attribuée à un effet thermo acoustique. La capacité extrêmement ténue de production de chaleur de ces films produit une large gamme de fréquences et un haut niveau de pression sonore. Sur base de cette découverte, nous avons fabriqué des haut-parleurs constitués de fin film de nanotubes de carbone. Ils possèdent les avantages suivants : épaisseur mesurable en nanomètres, transparence, souplesse et absence d’effets d’aimantation. Une telle unité de haut-parleur en film fin peut être taillée dans n’importe quelle taille et n’importe quelle forme, mise sur pied ou installée sur une surface insonorisée, ce qui pourrait ouvrir un nouveau champ d’applications et d’approches dans la fabrication de haut-parleurs et d’autres équipements acoustiques. »
Les chercheurs ont utilisé un vibromètre laser pour détecter d’éventuelles vibrations dans leur haut-parleur à nanotube alors qu’il produisait du son, mais le film est resté résolument immobile durant toute l’expérience ! Dès lors, l’hypothèse qui s’est imposée aux chercheurs chinois est que ce haut-parleur fonctionne comme un appareil thermoacoustique.
En effet, quand un courant alternatif traverse le film, sa température oscille brutalement entre la température ambiante et 80° centigrades. Ces variations brutales de température provoquent, elles, des variations de pression dans l’air à proximité. Ce sont ces variations de pression induites par la chaleur qui produisent du son, plutôt qu’un mouvement physique - quel qu’il soit - du film de nanotubes lui-même.
Selon le Dr KaiLi Jiang, qui fait partie de l’équipe de chercheurs, ces haut-parleurs en nanotube de carbone présentent des avantages-clé par rapport aux haut-parleurs « classiques » : « Les haut-parleurs standards, qui produisent du son au moyen de la vibration d’un cône, cessent de fonctionner quand ce cône est déchiré. Par contre, le haut-parleur en nanotubes de carbone, lui, ne vibre pas, ce qui signifie qu’il continuera à émettre du son même si le film est partiellement déchiré. »
Plus fort encore : selon le Pr Fan, ces films peuvent être étirés ou pliés dans les formes les plus complexes tout en conservant leurs propriétés acoustiques. A leur étirement maximal, ces feuilles deviennent transparentes, ce qui permettrait par exemple de les fixer sur un écran LCD pour remplacer les haut-parleurs classiques…
Un petit bémol, toutefois : branché sur la sortie standard d’un amplificateur audio classique, le haut-parleur à nanotubes produit une certaine distorsion sonore, due au fait que la température des nanotubes de carbone soumis à un courant audiofréquence grimpe à 80° C - ce, que la polarité du signal émis soit positive ou négative -, créant ainsi une compression. Les nanotubes refroidissent quand le voltage est nul - c’est-à-dire ni positif, ni négatif -, créant une dépression.
En conséquence, les compressions / dépressions se produisent à une fréquence double de celle du voltage analogique entrant, avec pour résultat une distorsion sonore importante et un son « aigrelet ».
L’équipe de chercheurs a néanmoins réussi à contourner partiellement cette difficulté en utilisant un amplificateur audio unipolaire « maison » en lieu et place des appareils bipolaires disponibles sur le marché.
Malgré tout, on est encore loin de la qualité hi-fi, comme cette vidéo d’un haut-parleur en film de nanotubes de carbone vous permettra de le constater. Affaire à suivre, donc…
Sources :
- article de Colin Barras sur le site Internet de New Scientist.
- résumé de l’article original chinois publié sur le site de ACS Publications.
Traduction et adaptation : Vinciane Baudoux.
Cette découverte se base sur une nouvelle application des nanotubes de carbone (photo ci-dessous (c) Wikipédia), structures physiques déjà abondamment étudiées par les chercheurs du monde entier depuis les années 1990. Ces minuscules agencements sont en effet déjà largement pressentis comme moyen potentiel d’administrer des médicaments aux malades et pourraient également être dotés d’usages plus « exotiques », comme la réalisation artificielle de la photosynthèse, ou encore des ascenseurs spatiaux, si, si !
Cependant, personne jusqu’à présent n’avait songé à tester leurs propriétés acoustiques, voilà donc qui est fait, et apparemment nous ne sommes pas au bout de nos surprises…
« Nous avons découvert que des films très fins constitués de nanotubes de carbone, une fois alimentés par un courant électrique audiofréquence, pouvaient émettre des sons audibles. L’origine de ce phénomène a pu être attribuée à un effet thermo acoustique. La capacité extrêmement ténue de production de chaleur de ces films produit une large gamme de fréquences et un haut niveau de pression sonore. Sur base de cette découverte, nous avons fabriqué des haut-parleurs constitués de fin film de nanotubes de carbone. Ils possèdent les avantages suivants : épaisseur mesurable en nanomètres, transparence, souplesse et absence d’effets d’aimantation. Une telle unité de haut-parleur en film fin peut être taillée dans n’importe quelle taille et n’importe quelle forme, mise sur pied ou installée sur une surface insonorisée, ce qui pourrait ouvrir un nouveau champ d’applications et d’approches dans la fabrication de haut-parleurs et d’autres équipements acoustiques. »
Les chercheurs ont utilisé un vibromètre laser pour détecter d’éventuelles vibrations dans leur haut-parleur à nanotube alors qu’il produisait du son, mais le film est resté résolument immobile durant toute l’expérience ! Dès lors, l’hypothèse qui s’est imposée aux chercheurs chinois est que ce haut-parleur fonctionne comme un appareil thermoacoustique.
En effet, quand un courant alternatif traverse le film, sa température oscille brutalement entre la température ambiante et 80° centigrades. Ces variations brutales de température provoquent, elles, des variations de pression dans l’air à proximité. Ce sont ces variations de pression induites par la chaleur qui produisent du son, plutôt qu’un mouvement physique - quel qu’il soit - du film de nanotubes lui-même.
Plus fort encore : selon le Pr Fan, ces films peuvent être étirés ou pliés dans les formes les plus complexes tout en conservant leurs propriétés acoustiques. A leur étirement maximal, ces feuilles deviennent transparentes, ce qui permettrait par exemple de les fixer sur un écran LCD pour remplacer les haut-parleurs classiques…
Un petit bémol, toutefois : branché sur la sortie standard d’un amplificateur audio classique, le haut-parleur à nanotubes produit une certaine distorsion sonore, due au fait que la température des nanotubes de carbone soumis à un courant audiofréquence grimpe à 80° C - ce, que la polarité du signal émis soit positive ou négative -, créant ainsi une compression. Les nanotubes refroidissent quand le voltage est nul - c’est-à-dire ni positif, ni négatif -, créant une dépression.
En conséquence, les compressions / dépressions se produisent à une fréquence double de celle du voltage analogique entrant, avec pour résultat une distorsion sonore importante et un son « aigrelet ».
L’équipe de chercheurs a néanmoins réussi à contourner partiellement cette difficulté en utilisant un amplificateur audio unipolaire « maison » en lieu et place des appareils bipolaires disponibles sur le marché.
Malgré tout, on est encore loin de la qualité hi-fi, comme cette vidéo d’un haut-parleur en film de nanotubes de carbone vous permettra de le constater. Affaire à suivre, donc…
Sources :
- article de Colin Barras sur le site Internet de New Scientist.
- résumé de l’article original chinois publié sur le site de ACS Publications.
Traduction et adaptation : Vinciane Baudoux.
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