
Le
festival Agora de l’
IRCAM (
Institut de coordination acoustique-musique), dédié à la musique contemporaine et à la création musicale et multimédia, se déroulera à Paris (France) du 8 au 19 juin 2009 sous l’égide de
Frank Madlener, directeur de l’IRCAM.
Sous-titré «
Sentiers qui bifurquent », inspiré par l’œuvre de
Luciano Berio et par l’esprit de
Jorge Luis Borges, Agora prend cette année la forme d’une rencontre transdisciplinaire autour de la complexité dans les arts et la science.
La programmation de cette édition est particulièrement touffue : concerts de musiques mixtes et instrumentales, installations sonores et vidéo, rétrospective exhaustive de l’œuvre cinématographique de
Lars Von Trier (avec, en point d’orgue, une rencontre par visioconférence avec le cinéaste), symposium sur la notion de la complexité dans les arts et les sciences, etc.
Dans cette offre foisonnante, nous avons sélectionné les activités qui présentaient un lien avec les musiques électroacoustiques et mixtes, ainsi qu’avec les technologies de création sonore :
Ne manquez pas l’installation
Passages [couloir sonore dynamique], un « dispositif sonore de déviation perceptive » conçu par
Pierre Jodlowski :
A partir des souvenirs marquants des salariés de Siemens France, le compositeur a créé ce couloir dynamique, sorte de « travelling » sonore sur des fragments de mémoire où s’ouvrent des espaces acoustiques modifiés…
Disposée dans les locaux mêmes de Siemens France, l’installation est accessible les 8 et 13 juin de 13 h à 18 h, ainsi que du 9 au 26 juin du lundi au vendredi sur réservation au [00 33] (0) 1 49 22 43 12.

Côté concerts, une fois n’est pas coutume, ce millésime d’Agora s’ouvrira, le lundi 8 juin à 21 h 30 dans la grande salle du Centre Pompidou, sur un concert… de jazz ! - expérimental -, avec le trio belge
Aka Moon (photo à droite (c) M.F. Plissard).
Ses membres ont pénétré dans les studios de l’IRCAM pour y découvrir un nouveau partenaire de jeu spécialisé dans l’improvisation,
le logiciel OMax, basé sur OpenMusic et Max/MSP, d’où son nom.
A partir du jeu réel des musiciens, le logiciel crée un clone et offre la possibilité de jouer soit avec les capacités d’apprentissage, soit avec le caractère imprévisible de la machine.
Aka Moon se compose de
Fabrizio Cassol, saxophone ;
Michel Hatzigeorgiou, basse ; et
Stéphane Galland, batterie ; la réalisation informatique musicale IRCAM est assurée par
Gilbert Nouno ; conception et programmation OMax :
Gérard Assayag,
Georges Bloch et
Marc Chemillier.
Le mardi 9 juin à 20 h 30 à la salle des concerts de la Cité de la musique, le jeune compositeur colombien
Luis Fernando Rizo-Salom donnera la réplique à l’anti-opéra
Passagio de
Luciano Berio, qui sera joué en première partie de concert, en nous proposant en seconde partie ses
Trois manifestes, dans lesquels trois groupes de musiciens se déploient dans l’espace tandis que l’électronique s’insinue au plus proche de l’auditeur via de petits haut-parleurs placés sous les sièges…
Le jeudi 11 juin à 20 h à la Salle Pleyel, une seconde soirée sera consacrée à
Berio, avec au programme
Fromazionni, pièce dans laquelle les hiérarchies traditionnelles de l’orchestre se voient bousculées par les déplacements - réels - des musiciens.
Bruno Mantovani viendra lui faire écho avec la création de son
Livre des illusions, dans lequel les hiérarchies de l’orchestre sont cette fois modifiées par des déplacements virtuels des musiciens, dont la performance est traitée en temps réel par un dispositif électronique.
Au programme également, les
Cinq pièces op. 10 d’Anton Webern, qui vient, lui, bousculer l’orchestre par une réorganisation inhabituelle des timbres…
Avec l’
Orchestre de Paris sous la direction de
Jean Deroyer.

La seule pièce purement « électronique » de cette édition 2009 d’Agora se fera quant à elle entendre le vendredi 12 juin à 20 h 30 et le dimanche 14 juin à 16 h dans l’Auditorium du Musée du Louvre sous le tire d’
Häxan, la sorcellerie à travers les âges.
La musique créée par
Mauro Lanza et
Olivier Pasquet pour le film muet éponyme de
Benjamin Christensen (Suède, 1921), s’efforcera d’étayer une fois encore le principe selon lequel films d’avant-garde de jadis et musique expérimentale d’aujourd’hui peuvent se combiner avec bonheur.
Cette performance s’inscrit dans le cadre du nouveau programme « Electrons libres » du Centre Pompidou, qui conjugue les matières sonores et visuelles. Ici, Mauro Lanza se dote d’un dispositif électronique permettant de relier directement la structure musicale à la structure du film, intégrant les données de l’image pour les traiter en temps réel.
Si vous voulez découvrir la musique d’après-demain, ne manquez pas, le samedi 13 juin à 16 h 30 au Centquatre, le concert donné par les jeunes compositeurs qui ont suivi le
Cursus 2 d’informatique musicale de l’IRCAM.
Ces jeunes créateurs affirment leurs partis pris - esthétiques antinomiques, approches de l’électronique divergentes. Derrières ces divergences majeures, les pièces d’
Aaron Einbond,
Fernando Villanueva Carretero,
Paul Clift et
Alban Richard présentent une idée commune fondamentale : celle d’expérimenter des dispositifs informatiques qui s’intègrent de manière organique à leur propos musical.
Le mardi 16 juin à 21 h, rendez-vous à l’église Saint-Eustache pour un concert d’orgue… contemporain, avec des œuvres de
Toshio Hosokawa,
György Ligeti,
Philippe Maintz,
Hyun-Hwa Cho et
Iannis Xenakis.
Vox Humana de
Hyun-Hwa Cho (transmute, grâce à l’électronique, l’instrument monumental de Saint-Eustache en un gigantesque synthétiseur contemporain ! D’un ancien jeu d’orgue surgit tout à coup l’apparence de la voix humaine. La vidéo de
Raphaël Thibault met en scène danse contemporaine et animation 3D ; avec
Francesco Filidei à l’orgue.
Après l’orgue, c’est au tour, le mercredi 17 juin à 20 h au Musée d’Orsay, de la pratique musicale de l’accompagnement d’être remise au goût du jour.
Mais comment accompagner un soliste - c’est-à-dire anticiper et suivre son geste - quand l’accompagnateur est… un ordinateur ?
Vassos Nicolaou,
Georges Aperghis,
Daï Fujikura - dans la pièce duquel un orchestre virtuel naît d’un unique alto réel - et
Marco Stroppa tentent de relever cette gageure d’une musique de chambre accompagnée par l’électronique.
Le vendredi 19 juin à 19 h, l’espace de projection de l’IRCAM deviendra le théâtre d’un singulier spectacle : quatre œuvres majeures du peintre espagnol
Goya feront l’objet d’une « relecture » musicale par son compatriote
Alberto Posadas.
Les Parques,
Saturne dévorant l’un de ses enfants,
Le chien et
Deux étrangers deviennent dès lors une matière orchestrale soumise à la spatialisation et aux interventions électroniques qui immergent l’auditeur.
Une vidéo en manière de frise du Colombien
Carlos Franklin, placée au-dessus de l’ensemble instrumental, évoquera l’œuvre du peintre.
Le même soir à 21 h au Centre Pompidou, lors d’un concert donné par le
Quatuor Arditti et la soprano
Barbara Hannigan, dans sa pièce
Operspective Hölderlin,
Philippe Schoeller explorera l’invention scénique selon les potentialités de la profondeur de champ, de l’horizon virtuel ou de l’ouverture dynamique de scène frontale offerts par le
système WFS (« Wave Field Synthesis », synthèse de front d’ondes -
photo ci-dessous (c) IRCAM) de diffusion sonore.
Mentionnons encore, les mercredi 10, jeudi 11 et vendredi 12 juin de 9 h 30 à 18 dans la petite salle du Centre Pompidou, le
symposium « Les sentiers qui bifurquent » sur la complexité dans les arts et la science ; vous trouverez le détail de ce symposium et la liste des intervenants sur le site Internet d’Agora.

Enfin, pour ceux d’entre vous qui sont attirés par les dernières avancées de la technologie en matière de création sonore, ne manquez pas, le mardi 16 de 17 h à 20 h, le mercredi 17 de 17 h à 19 h et le jeudi 18 juin de 17 h à 20 h au studio 5 de l’IRCAM, la rencontre organisée autour du
projet européen SAME.
SAME a pour objectif d’expérimenter les dispositifs technologiques offrant au mélomane de nouveaux modes d’interaction avec la musique, notamment sur les téléphones portables.
Le public est ici invité à tester les premiers prototypes par le biais de la production collective d’un morceau de musique interactive -
Sound Painting de
Pierre Jodlowski (photo à droite (c) DR) - avec spatialisation par WFS (Wave Field Synthesis) et contrôle gestuel, de la navigation spatiale dans un orchestre virtuel, ainsi que du jeu collectif avec des instruments de musiques et des jouets sonores par téléphone portable (« Mobile sonic playground »).
En résumé, voici une édition d’Agora qui s’annonce passionnante, avec de nombreuses découvertes en perspective !
Vinciane Baudoux - Consulter le
programme détaillé d’Agora 2009.
Renseignements : Festival Agora IRCAM 1 place Igor Stravinsky
F-75004 Paris
France
Tél. : [00 33] (0) 1 44 78 48 16